Le télétravail d’aujourd’hui et de demain (Partie 2)

Comment gérer les horaires des salariés en télétravail ?

Le télétravailleur possède les mêmes droits que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l'entreprise. L'employeur doit donc veiller au respect des durées de travail maximales quotidiennes (10 heures par jour) et hebdomadaires (48 heures par semaine et 44 heures en moyenne sur 12 semaines consécutives) ainsi qu'aux temps de repos obligatoires (11 heures par jour).

L’accord collectif, la charte ou à défaut le document formalisant la mise en place individuelle du télétravail, doit impérativement déterminer des plages horaires durant lesquelles l'employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail. Celui-ci doit respecter la vie privée du salarié en télétravail et le droit à la déconnexion.

Comment puis-je contrôler leur activité ?

L'accord collectif, la charte, ou à défaut le document formalisant la mise en place individuelle du télétravail, doit prévoir les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail. Le document peut mettre en place la remise par le salarié d'un état récapitulatif des horaires effectués ou l’installation d'un logiciel de gestion des horaires sur l'ordinateur. A défaut, l’employeur encourt un risque de demande d’heures supplémentaires ou de dommages et intérêts pour non-respect de son obligation de sécurité.

Si un moyen de surveillance est mis en place, (i), il doit être pertinent et proportionné à l'objectif poursuivi, (ii) le télétravailleur doit en être informé, (iii) il doit faire l'objet d'une information et d'une consultation préalable du CSE. En revanche, l'employeur ne peut pas installer des logiciels de contrôle systématique et automatisé de l'activité du salarié sur son ordinateur professionnel.

L'employeur doit organiser, chaque année, un entretien avec le télétravailleur qui porte notamment sur les conditions d'activité du salarié et sa charge de travail.

S’agissant de l’usage d’outils numériques, l’ANI du 26 novembre 2020 précise que l’employeur informe le salarié en télétravail des dispositions légales et des règles propres à l’entreprise relatives à la protection de ces données et à leur confidentialité. A cet égard, les partenaires sociaux recommandent l’établissement d’un document communiqué aux salariés contenant un socle de consignes minimales à respecter en télétravail ou encore la mise à disposition aux salariés d’une liste d’outils de communication et de travail collaboratif appropriés au travail à distance, qui garantissent la confidentialité des échanges et des données partagées.

Comment respecter l’obligation de sécurité s’agissant d’un salarié en télétravail ?

Dans le cadre de son obligation générale de sécurité et de protection de la santé du salarié, l'employeur doit s'assurer, préalablement à la mise en place du télétravail, de la conformité du lieu de travail et notamment de ses installations électriques.

Si cette vérification ne pose pas de difficulté dans un tiers lieu de travail, elle semble plus difficile à réaliser au domicile du salarié, en raison du principe du respect de sa vie privée et de l'obligation d'obtenir son accord préalable pour pouvoir accéder à son domicile. Pour contourner cette difficulté, l'employeur peut demander au salarié de lui fournir une attestation sur l'honneur de conformité des installations électriques et techniques, après l'avoir informé sur les risques encourus en cas d'installation non conforme.

Le télétravail engendre incontestablement des risques professionnels pouvant être amplifiés du fait de l'éloignement et de l'isolement du salarié. Il peut engendrer des risques physiques (musculosquelettiques liés aux contraintes posturales, visuels…) en raison notamment d'une mauvaise ergonomie de l'espace de travail ou d'une installation défectueuse ainsi que des risques psychosociaux.

A ce titre, l’ANI du 26 novembre 2020 insiste sur la prévention de l’isolement : le salarié en télétravail doit pouvoir alerter son manager de son éventuel sentiment d’isolement, afin que ce dernier puisse proposer des solutions pour y remédier.

L'employeur doit être vigilant sur ces points, notamment lors de l'évaluation des risques professionnels dans son entreprise.

A noter que l'accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l'exercice de l'activité professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident du travail. Il appartient à l'employeur qui entend contester cette qualification de démontrer que l'accident du salarié est sans lien avec l'exécution de son travail, ce qui peut s'avérer difficile si l'accident est survenu au domicile du salarié.

Dois-je former mes salariés au télétravail ?

L’ANI du 26 novembre 2020 incite fortement les entreprises à proposer des formations aux managers et aux collaborateurs.

L’ANI précise que des formations peuvent notamment être proposés sur les thématiques suivantes : l’adaptation des modalités de réalisation de l’activité, l’autonomie du salarié en télétravail, le séquençage de la journée de télétravail, le respect du cadre légal relatif à la durée du travail et à la déconnexion, l’utilisation régulée des outils numériques et collaboratifs. Des guides pratiques peuvent également être mis à disposition pour accompagner les managers et salariés dans la mise en place du télétravail. En outre, il est recommandé que les managers soient, dès leur prise de poste, formés aux modalités du management à distance et à la prise en compte des particularités de l’hybridation de l’organisation du travail : articulation et concomitance entre télétravail et travail sur site. Le CLéA Manager, dont la création a été acté par l’ANI du 28 février 2020 portant diverses orientations pour les cadres, pourra utilement être mobilisé. 

Puis-je instaurer le télétravail avec un salarié installé à l’étranger ?

Depuis le début de la crise sanitaire, le télétravail hors des frontières du pays d’établissement de l’employeur est un phénomène en pleine expansion.

A ce jour, aucune disposition de droit français ne l’interdit ni ne l’envisage. Et pourtant, le télétravail à l’étranger engendre de nombreuses questions juridiques telles que par exemple :

  • Comment s’assurer du respect par l’employeur de son obligation de sécurité lorsque le salarié se trouve à des milliers de kms de l’entreprise ?
  • Qui va prendre en charge les frais de déplacements du salarié pour se rendre à un rendez-vous professionnel, une réunion ou une formation dans les locaux de l’employeur ?
  • Quelle loi applicable au contrat de travail dés lors que le travail s’effectue sur un autre territoire que celui du lieu d’établissement de l’employeur ?
  • Quel régime social (santé, prévoyance) pour le salarié établi dans un pays étranger ?

Une chose est certaine : le télétravail à l’étranger ne peut être appréhendé à la légère. Ainsi, avant de donner son accord au salarié, l’employeur doit procéder à une étude précise de faisabilité et mettre, le cas échéant, en place des conditions sécurisées de télétravail pour chaque salarié concerné. Il est donc recommandé de se faire assister par un expert en mobilité internationale sur ce sujet.

Conclusion

Le télétravail représente incontestablement une opportunité en termes de flexibilité dans l’organisation de travail des entreprises et des salariés et un moyen d’adaptation efficace à des contextes inédits. Toutefois, un recours non anticipé et non maîtrisé au télétravail est facteur de nombreux risques.

C’est pourquoi, son déploiement doit faire l’objet d’une concertation associant la direction, le CSE et les salariés concernés. Par ailleurs, il est fortement recommandé de conclure un accord collectif ou d’une charte fixant les modalités et conditions de mise en œuvre du télétravail dans l’entreprise.

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