L’innovation française retient son souffle…

L’instabilité politique que connait actuellement la France créé un flou important pour nos PME, véritable vivier de l’innovation.
Si la France n’est pas connue pour ses taux d’imposition particulièrement bas, elle se positionne en revanche en exemple en matière de soutien à la recherche et à l’innovation grâce à différents mécanismes comme le plus connu, le crédit d’impôt recherche (CIR) mais également le crédit d’impôt innovation (CII) ou encore le statut de jeune entreprise innovante (JEI).

Les nombreux débats et amendements autour du projet initial de loi de finances pour 2025 ont mis une nouvelle fois en relief les interrogations de certains quant à la pertinence de ces mécanismes. Il est notamment fait reproche au CIR de bénéficier principalement aux grandes entreprises dont les investissements dans la recherche resteraient limités.

Si l’abandon du projet de loi de finances clôt temporairement le débat pour ce dernier… la question du maintien du CII se pose pour de nombreuses PME. En effet, contrairement au premier, le code général des impôts prévoit que celui-ci n’est applicable que jusqu’au 31 décembre 2024.

Or, le projet de loi spéciale étudié mercredi en Conseil des ministres n’a vocation qu’à permettre à l’Etat de continuer à percevoir l’impôt. Le dispositif de CII risque donc fort de ne pas être reconduit pour le moment. Certains soulevaient en effet la possibilité qu’un nouveau projet de loi de finances soit encore déposé mais cette éventualité parait désormais peu probable malgré la nomination d’un nouveau premier ministre.

Ces questions inquiètent donc évidemment l’ensemble des acteurs de l’innovation. Toutefois, il nous semble possible d’y apporter certains tempéraments.

En premier lieu, le CII calculé sur les dépenses 2024 pourra bien être utilisé en 2025 (ou au titre des années suivantes) ce qui laisse au législateur une année pour reconduire le système et aux entreprises une année pour tenter de s’adapter. Rappelons que, contrairement à l’article 2 du Code civil, les lois de finances peuvent prévoir des dispositions « rétroactives » de sorte que le système pourrait être reconduit courant 2025. Toutefois, à défaut de visibilité, la prudence pourrait conduire bon nombre de PME à limiter leurs efforts d’innovation ce qui n’est évidemment pas souhaitable.

En second lieu, contrairement au CIR, le CII ne bénéficie qu’aux PME ce qui créé une forme de consensus. Sa reconduction, proposée par amendement dans le cadre du premier projet de loi désormais abandonné, a d’ailleurs été accueillie favorablement par la Commission des finances et le Gouvernement puis votée par le Sénat dans une forme un peu rabotée (20% au lieu de 30%).

Il est donc légitime de penser qu’il en sera de même dans le cadre du prochain projet de loi de finances.

S’agissant de l’exonération des cotisations patronales des JEI, celle-ci devrait encore s’appliquer jusqu’au prochain projet de loi. Toutefois, les entreprises concernées devront donc être particulièrement attentives à ce point lors des prochains débats.

Il en sera de même pour le CIR qui, bien qu’inchangé pour le moment, pourrait faire l’objet de nouvelles mesures, potentiellement à compter du 1er janvier 2025, les dernières retenues étant principalement la suppression de la prise en compte des rémunérations des jeunes docteurs pour le double de leur montant et la suppression des dépenses de brevets.

L’année 2025 s’annonce donc mouvementée pour l’innovation française.