Imputation du crédit d'impôt étranger aux dividendes avec imposition à la source

Imputation du crédit d'impôt étranger aux dividendes avec imposition à la source

Le Conseil d'Etat précise la nature de la quote-part de frais et charges («QPFC») de 5% qui doit s'analyser en une imposition effective pour la fraction excédant les frais réels. La Haute juridiction valide ainsi la possibilité pour les entreprises d’imputer des crédits d’impôts étrangers afférent aux dividendes soumis au régime-fille ayant supportés une imposition à la source.

 

CONTEXTE

Traditionnellement, l’administration fiscale refusait, de manière contestable, l’imputation d’un crédit d’impôt étranger sur l’impôt français au motif qu’une telle quote-part (sur dividendes ou plus-values) avait pour unique objet de neutraliser forfaitairement la déduction de charges et ne visait pas à soumettre ces dividendes ou plus-values à l’impôt sur les sociétés.

Cette interprétation avait pour origine la décision SA Fournier du Conseil d’Etat qui considérait que la QPFC du régime mère-fille avait pour objet « d’annuler, forfaitairement, la déduction de frais comptabilisés par l’ensemble des charges d’exploitation de la société mère » (CE, 9ème et 8ème ss-sect., 23 avril 1997, n° 145611, SA Fournier Industrie et Santé). 

Ainsi, jusqu’à présent, aucun crédit d’impôt étranger ne pouvait être imputé sur les QPFC.  

Pour autant fin 2021, le Conseil d’Etat a retoqué cette interprétation pour la QPFC de 12% sur les cessions de titres de participations étrangères. Pour la Haute Assemblée, la QPFC correspond à un « montant d’impôt français » permettant l’imputation d’un crédit d’impôt étranger. Dans cette décision, le Conseil d’Etat s’est écarté de sa précédente décision SA Fournier du fait d’une part, qu’il n’existe pas, de lien direct dans le texte même de la loi entre la QPFC et les charges exposés par l’entreprise et d’autre part, que cette augmentation graduelle du taux à 12% au fil des années s’explique par un objectif de rendement budgétaire (CE, 8ème-3ème ch., 15 novembre 2021, n° 454105, Sté Air Liquide).

Au regard de cette solution inédite, la Cour administrative d’appel (« CAA ») de Lyon s’est également prononcée en début d’année en faveur d’une imputation du crédit d’impôt étranger au cas de la QPFC sur distribution de dividendes bénéficiant du régime mère-fille en transposant les arguments de la nature d’imposition effective (CAA Lyon, 27 janvier 2022, n° 20LY00698).

 

ANALYSE DE LA DECISION

Dans sa décision du 5 juillet 2022, le Conseil d'Etat confirme la position de la CAA et annule par conséquent une partie de la doctrine administrative afférente à l'interprétation de l'article 216, I du Code général des impôts qui prévoit que la QPFC de 5% sur dividendes ne peut s’analyser comme conduisant à l’imposition d’une partie des dividendes.

Pour le Conseil d'Etat, siégeant en chambres réunies, le caractère forfaitaire de la quote-part de 5% à réintégrer au bénéfice imposable doit être "regardé non comme ayant pour seul objet de neutraliser la déduction, opérée au titre des frais généraux, des charges afférentes aux titres de participation dont les produits sont exonérés d'IS, mais comme visant à soumettre à cet impôt, lorsque le montant des frais est inférieur à cette quote-part forfaitaire, une fraction des produits de participations bénéficiant du régime des sociétés mères."

Par cette décision, la juridiction administrative remet partiellement en cause sa jurisprudence antérieure en considérant la QPFC du régime mère-fille comme une imposition résiduelle, pour la fraction de la QFPC de 5% excédent les frais réels.

Par cette qualification d’imposition, la juridiction administrative valide donc la possibilité pour les entreprises françaises bénéficiaires d’un dividende étranger soumis au régime mère fille, d’imputer l’impôt étranger dû à la source sur l’impôt sur les sociétés français.

 

OPPORTUNITES CONTENTIEUSES 

Les sociétés françaises percevant des dividendes de sources étrangères soumis au régime mère-fille dont les frais réels supportés sur ces derniers sont inférieurs à la QPFC de 5% peuvent déposer une réclamation contentieuse et bénéficier de ce nouveau droit à imputation. A noter, que le délai de réclamation expire au 31 décembre 2022 pour les dividendes versés au titre de l’exercice 2019.

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